• Vertiges sahariens Motocassoulet

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    J'allas deux multiples fois dans le Sahara, motocyclettement et au prix répété d'une intense satisfaction. J'aurais pu visiter le désert des Agriates ou celui de Gobi, le désert des Mojaves ou celui du Sinaï. Non, c'était le Sahara !
    J'ai passé ma jeunesse au bord du Rhône, et je n'ai longtemps connu de direction que celle, du nord au sud, que le Rhône impose au paysage. Je n'ai appris que le nord, qui pendant des mois d'affilée nous crachait le Mistral, et le sud qui souvent vomissait des averses de sable. C'est du moins mon souvenir.
    Je doncques redoutai de m’éloigner de mon fuseau horaire, et, de Portmahomak à Agadez, ne m'égarai point dans de sinistres longitudes.
    De ces voyages me poussèrent plusieurs vertiges, comme l'escarre au sédentaire.

    La première fois, en 1983, un quarteron de Yamaha 500 XT avait pour destination Agadez, au Niger. C'est le thème des billets intitulés "Nous partîmes quatre".

    La deuxième fois, mon ami Christian et moi, déplorant les rigueurs de l'hiver 1989 à Montélimar, avons projeté d'aller manger un cassoulet à l'ermitage du Père de Foucauld, situé à 2 780 m d'altitude dans les montagnes du Hoggar, au sud de l'Algérie. Nos motos étaient une Yamaha 600 XT et une 600 XT Ténéré. Ce voyage fait l'objet de cette rubrique. 

    Les billets contiennent de nombreuses blagues d'initiés ("private jokes"), les deux seuls initiés étant Christian et moi. Malheureusement, Christian étant mort d'une chute de vélo en juin 2009, je demeure le seul à ne plus rire de ces blagues.

    Ces pages de blog constituent le récit non pas de ces voyages, mais seulement de quelques événements marquants, livrés ici dans un ordre semi-lexicographique pseudo-aléatoire.

    Sur la photo, Christian.

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    Au poste frontière d'Hazoua, nous sommes cordialement accueillis par un douanier jeune et élégant, souriant. Ses paroles et ses gestes sont nets et francs. Il connaît son métier, et n'hésite pas un instant, les formalités sont vite réglées. Il nous tend nos papiers, puis se lève, ouvre la porte du bureau, jette un bref coup d'œil dans le couloir, referme la porte puis nous demande à voix basse :

    "Vous n'avez pas des francs français ?"

     


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     "Que d'sable, que d'sable." (Mohammed Al Mahon)

    Mots-clés : ambiance, sable, visière, whisky, Einstein, congère, boum-clac-boum-boum. [Construire le billet autour de ces mots-clés. Ne pas oublier de les mentionner.]

     Peu après Tozeur, la lumière devient ocre, l'ambiance oppressante. Du sable frappe nos casques dans un bruissement continu. Le vent latéral nous donne l'allure penchée et vacillante d'ivrognes. Puis peu à peu le vent se calme, mais l'étrange lumière ocre persiste encore longtemps. Elle disparaît brutalement, quand je relève ma visière. Je la referme, l'ouvre... L'atmosphère est limpide, la lumière printanière. Ma visière a été proprement sablée, elle est dépolie, je dois la laisser ouverte en permanence. Christian utilisait des lunettes de bonne qualité, qui sont restées intactes.

    Soudain et de façon inattendue, mon moteur se met à ratatouiller, puis il s'arrête. Les symptômes ressemblent à ceux d'une panne d'essence. La vérification est vite faite : mon réservoir est vide. S'il n'y a pas de fuite d'essence, alors cette panne est causée par une consommation démesurée... qui pourrait s'expliquer par l'obstruction du filtre à air par le sable. Nous faisons le point : le réservoir de Christian est presque vide lui aussi. Il ne nous reste en réserve que son petit jerrycan de 10 litres. La prochaine station est à Hassi-Messaoud, à environ 80 kilomètres. 

    La décision est vite prise : Christian nettoie son filtre à air ensablé, vide son jerrycan dans son réservoir, puis se rend à Hassi-Messaoud pour les remplir, pendant que je l'attends consciencieusement. Je secoue ma moto pour faire passer quelques décilitres d'essence inoccupés, qui restaient dans la partie gauche du réservoir, vers la partie droite d'icelui, où est situé le robinet. Puis je vais me cacher à quarante-deux mètres de la route, abrité des regards par quelques buttes de sable. Christian embraye, et, dans un ronflement sourdingue, il disparaît au tournant de la route, mais l'œil de Dieu continue à le voir (Vian, ou presque).
    Je m'aménage dans le sable un nid (douillet bien entendu), sors de ma sacoche un livre et une bouteille de whisky : je suis prêt à attendre seul, pendant deux ou trois heures, le retour de Christian.

    Désormais, il nous faudra surveiller régulièrement l'encrassement des filtres à air, et si nécessaire les nettoyer (avec de l'essence).

    Une autre conséquence de ce bain de sable est la plus grosse frayeur de ce voyage.
    Sur le chemin du retour, il fait frais sur les hauteurs de l'Atlas, et nous choisissons de trouver un hôtel pour dormir. La nuit tombe tôt à ces hautes latitudes, et nous roulons dans le noir, à peine éclairés par nos phares mal réglés, quand des congères de sable traversent brutalement la route devant nous. Et soudain boum-clac-boum-boum ! (voir plus haut). Le premier boum, c'est la rencontre avec la première congère. Le clac, c'est ma visière qui se referme sous l'effet du choc : dans la nuit, je me retrouve aveugle avec ma visière semi-opaque. La frayeur accompagne les boums suivants : je roule à environ septante kilomètres par heure, sans rien voir, et de surcroît pendant deux secondes je conduis de la seule main droite, la main gauche s'absentant du guidon pour relever la visière. Puis je prends assez vite une décision qui me paraît raisonnable : je vais m'arrêter pour vérifier que je suis bien indemne.

     


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    Les Vertiges sahariens vont prochainement constituer 2 rubriques : Nous partîmes quatre, et Motocassoulet.


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